Nous sommes très heureux de recevoir en cette rentrée littéraire, Jean-Hubert Gaillot, pour son quatrième roman Le Soleil, paru aux éditions de l’Olivier.
Jean-Hubert Gaillot est auteur mais aussi éditeur : avec Sylvie Martigny, il a créé et dirige encore aujourd’hui les merveilleuses éditions Tristram…
Son nouveau roman, Le Soleil, est une chasse au trésor littéraire. Le héros, Alexandre Varlop part en effet sur les traces d’un manuscrit mythique, jamais publié, qui serait tombé entre les mains d’artistes comme Man Ray, Ezra Pond ou Cy Twombly, et aurait grandement influencé leur œuvre. Le lecteur voyage avec Varlop autour de la Méditerranée (Mykonos, Palerme, Formentera) et dans l’histoire intellectuelle des avant-gardes du XXè siècle au fur et à mesure que son enquête avance… ou piétine. Car au-delà d’un roman d’aventures classiques, le Soleil est aussi un roman initiatique, une réflexion sur l’art et la création, un livre pour l’amour de la littérature.
La critique du Soleil dans Marianne, le 15 août 2014 – par Hubert Artus
A ceux qui doutent que la littérature est un art total : lisez ce livre. Pour le lecteur, le Soleil est un roman. Pour son narrateur et personnage central, Alexandre Varlop, c’est un horizon. Tout commence en Grèce, sur l’île de Mykonos. Débarqué ici à la demande d’une amie éditrice, notre homme a carte (financière) blanche pour retrouver un manuscrit qui y aurait été volé en 1961. Ce serait un «absolu de la littérature» : un cahier à couverture jaune, aux pages noircies par… le photographe surréaliste Man Ray.
Pour les initiés, c’est un Graal. Arrivé avec une malle entière de documents sur l’histoire dadaïste, notre homme s’immerge dans l’œuvre et l’histoire de Man Ray, Ezra Pound, Cy Twombly. Suivant les turpitudes de son personnage, Gailliot prend son pied en racontant Ray à Hollywood dans les années 50 (et son rôle supposé dans l’« affaire du Dahlia Noir », tel que l’ex-flic américain Steve Hodel nous l’avait expliqué dans son livre paru en France en 2004), la liaison du photographe avec son amante Lee Miller, l’érotisme de son œuvre.
Déboussolé par toutes ces directions (le lecteur aussi, doit-on dire, cette partie du livre devenant un peu indigeste), Varlop s’égare définitivement lorsqu’il tombe raide d’une photographe française, qui accompagne sur l’île un mystérieux couple anglais. Convaincu que ce manuscrit volé est un leurre, il se met à suivre ses instincts – et la photographe française. Le Soleil devient alors un livre complètement allumé, menant personnage et lecteur à Palerme (où aurait été dealé le carnet jaune par une mystérieuse Française). Une escale qui nous vaudra la visite d’un lieu de partouze et de pénétrations en public : une centaine de pages que Gailliot a fait imprimer sur… du papier rose !
Quant à l’ultime partie, à Formentera, c’est aussi la plus poétique, où relations et machinations se dévoilent. Au final : une composition sur la géopolitique de l’art et de l’amour comme rarement lue. Roman dans le roman, livre de tous les livres, le Soleil doit plus encore à Pasolini (pour la poétique artistique et intellectuelle) et à Wenders (pour la beauté lumineuse de l’errance) qu’aux dadaïstes à proprement parler. Une beauté.